Exister...
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Pimbi
grumpythedwarf
Floréane
7 participants
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Exister...
C'était elle.
Il l'avait reconnue immédiatement, au bond de son coeur dans sa poitrine. Dans cette foule dense des derniers jours de décembre, sa silhouette haute et fière se frayant un chemin, telle une reine parmi ses sujets grouillants, avait attiré son regard comme le sang attire le requin.
Il la suivait donc, sans crainte aucune d'être détecté au milieu de cette foule de fourmis affairées. Un scenario bouillait dans son crâne, se construisait autour de la démarche altière de l'inconnue. L'aborder, recueillir son sourire étonné, l'inviter "il fait si froid : un punch, un café ?". elle rirait à l'idée du punch si tôt dans la journée, accepterait le café dans un bar bruissant de voix. Elle ôterait son écharpe rouge, dévoilerait son cou gracile et blanc, déboutonnerait son manteau sur un lainage clair, secouerait sa coiffure d'un geste élégant. Il sentirait son parfum fleuri de froid. Elle lui sourirait, de ce délicieux sourire qu'ont les femmes séduites ou qui veulent l'être.
Elle s'arrêta devant une vitrine à peine éclairée où rougeoyait une fausse cheminée et le verre impitoyable lui renvoya soudain son image : c'était bien lui, ce grand corps maigrelet flottant dans un imper trop large, cette figure banale à pleurer sous le cheveu rare, ce regard de chien battu. Il était resté larve, chrysalide jamais éclose. Elle, elle était radieuse, avec ce visage épanoui et heureux de qui projette la fête, les lumières, les embrassades. Elle ne vit même pas le pantin blême arrêté à ses côtés, son regard implorant.
Elle avait repris sa course à travers la fourmilière, il la suivait, les yeux pleins de brouillard.
La lame damassée, cruellement ondulée, traversa le corps, à hauteur des reins, sans un à-coup. Elle stoppa net, resta une fraction de seconde immobile. Il imagina la bouche béant de surprise, les yeux soudain exorbités, le cerveau affolé. Elle se courba, les genoux ployés, vacilla. Un couple la bouscula, la fit tomber. Il contourna le manteau blanc affalé sur le trottoir et que des mains charitables essayaient déjà de relever. Contre sa cuisse, le kriss poissait sa peau comme du bonbon fondu.
Tout à l'heure, il regarderait les nouvelles à la télé. Nul doute qu'il ferait la une du JT. On parlerait de lui, on se perdrait en conjectures foireuses, en hypothèses idiotes, en explications psycho-débiles. Il existerait. Enfin.
Il l'avait reconnue immédiatement, au bond de son coeur dans sa poitrine. Dans cette foule dense des derniers jours de décembre, sa silhouette haute et fière se frayant un chemin, telle une reine parmi ses sujets grouillants, avait attiré son regard comme le sang attire le requin.
Il la suivait donc, sans crainte aucune d'être détecté au milieu de cette foule de fourmis affairées. Un scenario bouillait dans son crâne, se construisait autour de la démarche altière de l'inconnue. L'aborder, recueillir son sourire étonné, l'inviter "il fait si froid : un punch, un café ?". elle rirait à l'idée du punch si tôt dans la journée, accepterait le café dans un bar bruissant de voix. Elle ôterait son écharpe rouge, dévoilerait son cou gracile et blanc, déboutonnerait son manteau sur un lainage clair, secouerait sa coiffure d'un geste élégant. Il sentirait son parfum fleuri de froid. Elle lui sourirait, de ce délicieux sourire qu'ont les femmes séduites ou qui veulent l'être.
Elle s'arrêta devant une vitrine à peine éclairée où rougeoyait une fausse cheminée et le verre impitoyable lui renvoya soudain son image : c'était bien lui, ce grand corps maigrelet flottant dans un imper trop large, cette figure banale à pleurer sous le cheveu rare, ce regard de chien battu. Il était resté larve, chrysalide jamais éclose. Elle, elle était radieuse, avec ce visage épanoui et heureux de qui projette la fête, les lumières, les embrassades. Elle ne vit même pas le pantin blême arrêté à ses côtés, son regard implorant.
Elle avait repris sa course à travers la fourmilière, il la suivait, les yeux pleins de brouillard.
La lame damassée, cruellement ondulée, traversa le corps, à hauteur des reins, sans un à-coup. Elle stoppa net, resta une fraction de seconde immobile. Il imagina la bouche béant de surprise, les yeux soudain exorbités, le cerveau affolé. Elle se courba, les genoux ployés, vacilla. Un couple la bouscula, la fit tomber. Il contourna le manteau blanc affalé sur le trottoir et que des mains charitables essayaient déjà de relever. Contre sa cuisse, le kriss poissait sa peau comme du bonbon fondu.
Tout à l'heure, il regarderait les nouvelles à la télé. Nul doute qu'il ferait la une du JT. On parlerait de lui, on se perdrait en conjectures foireuses, en hypothèses idiotes, en explications psycho-débiles. Il existerait. Enfin.
Floréane- Habitué du forum ++
- Messages : 51504
Date d'inscription : 27/11/2012
Localisation : plein sud
Re: Exister...
Ton texte est d'actualité.
Ils font n'importe quoi pour exister.
Tuer, de préférence.
Un instant de notoriété, quel que soit le prix.
Orgueuil, ego, illusion.
Triste.
Ils font n'importe quoi pour exister.
Tuer, de préférence.
Un instant de notoriété, quel que soit le prix.
Orgueuil, ego, illusion.
Triste.
grumpythedwarf- Habitué du forum ++
- Messages : 34157
Date d'inscription : 03/10/2012
Localisation : Au diable Vauvert
Re: Exister...
Je ne suis pas douée pour écrire gai...
Floréane- Habitué du forum ++
- Messages : 51504
Date d'inscription : 27/11/2012
Localisation : plein sud
Re: Exister...
T'inquiète. Les histoires gaies, ça me déprime.
J'ai toujours préféré le drame à la comédie.
J'ai toujours préféré le drame à la comédie.
grumpythedwarf- Habitué du forum ++
- Messages : 34157
Date d'inscription : 03/10/2012
Localisation : Au diable Vauvert
Re: Exister...
Moi aussi : ça tombe bien, toute ma vie est un vaste drame... hélas !grumpythedwarf a écrit:T'inquiète. Les histoires gaies, ça me déprime.
J'ai toujours préféré le drame à la comédie.
Mais c'est fini : tout s'arrête aujourd'hui. Je regarde le ciel, des fois que j'y verrais l'astéroïde fatale.
Je vous dirai...
Mais si c'est du pipeau, toutes ces histoires, j'envoie une lettre piégée aux Mayas ! Nonméheu !
Pimbi- Habitué du forum ++
- Messages : 21920
Date d'inscription : 27/09/2012
Localisation : En transit forcé
Re: Exister...
Paf ! Dans la gueule, les mayas !
grumpythedwarf- Habitué du forum ++
- Messages : 34157
Date d'inscription : 03/10/2012
Localisation : Au diable Vauvert
Re: Exister...
N'empêche que ce sont des sales racistes ! si l'humanité doit disparaître aujourd'hui, les Australiens sont considérés comme quoi, des kangourous ?
Medea- Habitué du forum +
- Messages : 17634
Date d'inscription : 01/10/2012
Localisation : Koutaïs
Re: Exister...
Il semble bien...
Floréane- Habitué du forum ++
- Messages : 51504
Date d'inscription : 27/11/2012
Localisation : plein sud
Re: Exister...
"comme le sang attire le requin..."
J'aime beaucoup ton texte Floréane!
J'aime beaucoup ton texte Floréane!
jeudi- Habitué du forum
- Messages : 1998
Date d'inscription : 06/12/2012
Re: Exister...
Merci.
Il faudrait quand même que je m'entraîne à écrire "gai" !
Il faudrait quand même que je m'entraîne à écrire "gai" !
Floréane- Habitué du forum ++
- Messages : 51504
Date d'inscription : 27/11/2012
Localisation : plein sud
Re: Exister...
Si c'est le drame qui t'inspire, pourquoi écrire "gai"?
jeudi- Habitué du forum
- Messages : 1998
Date d'inscription : 06/12/2012
Re: Exister...
Eh bé, j'étais loin de penser que ton récit aurait une telle chute (c'est le cas de le dire !) !
En tout cas bravo, fort jolie plume tu as et c'est un plaisir de te lire !
Ondeline- Grande libellule à la conscience transcendée
- Messages : 636
Date d'inscription : 26/09/2012
Localisation : le haut Beaujolais
Re: Exister...
Je suis ravie que ça t'ait plu
Pour la plume, je ferais bien de me relire mais je ne le fais jamais... Donc c'est brut de décoffrage !
Pour la plume, je ferais bien de me relire mais je ne le fais jamais... Donc c'est brut de décoffrage !
Floréane- Habitué du forum ++
- Messages : 51504
Date d'inscription : 27/11/2012
Localisation : plein sud
Re: Exister...
Très bien écrit! chapeau bas! il fallait y penser...et pourtant, je ne suis jamais en panne d'inspiration! J'ai écrit des tas d'histoires et des poèmes sans pieds...même sans queue ni tête!
Minerve- Habitué du forum +
- Messages : 12165
Date d'inscription : 13/02/2013
Localisation : Normandie
Re: Exister...
Floréane a écrit:Je suis ravie que ça t'ait plu
Pour la plume, je ferais bien de me relire mais je ne le fais jamais... Donc c'est brut de décoffrage !
Aime bien le brut de décoffrage, ça ne gâte rien bien au contraire, ça ajoute en réalisme et par voie de conséquence, en émotion.
Ondeline- Grande libellule à la conscience transcendée
- Messages : 636
Date d'inscription : 26/09/2012
Localisation : le haut Beaujolais
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